A des milliers de kilomètres
de Paris, dans le paisible village touristique d’El Nilo, à deux heures de voiture de Bogotá, la
capitale colombienne, une somptueuse villa située dans la propriété El
Palmar se retrouve au cœur de l’affaire Karachi, ce scandale de
corruption, d’attentat et de dessous-de-table qui tient la France en
émoi. La villa Cactus aurait coûté 600 000 euros, soit près d’un million
de dollars et son propriétaire, Thierry Gaubert, en aurait fait
l’acquisition à la fin des années 1990 pour y établir sa résidence
secondaire à travers une société, baptisée elle aussi Cactus, au
Bahamas. Cet intime du Président Sarkozy depuis le début de sa carrière
était à l’époque marié à la Princesse Hélène de Yougoslavie, celle qui
aujourd’hui raconte une partie de ses secrets à la police.El
Palmar est une propriété qui compte seulement deux maisons. L’autre
appartient à un ami de Thierry Gaubert, Jean-Philippe Couzi, ancien
époux d’Astrid Betancourt, la sœur d’Ingrid Betancourt et amie de la
Princesse Hélène. La maison de la princesse et de son époux, baptisée “Le Monastère” par
les gens du coin en raison de ses deux tours visibles de
loin, est un lieu de villégiature idéal. Construite sur un terrain de 40
hectares, elle est particulièrement remarquable par son immense piscine en forme de
trèfle. Les écuries accueillent quinze chevaux mais également des
vaches, toutes marquées d’une petite couronne, et de nombreux jardiniers
s’occupent de l’entretien de la propriété.C’est
le genre d’investissement typique des Français fortunés sous les
tropiques. L’arrivée de la princesse avec son escorte de cinq voitures,
dont une de l’ambassade française, de son mari et de leurs trois enfants
ainsi que des dizaines de valises faisait sensation dans le village. Selon les témoignages obtenus par Semana
à Nilo, le couple avait l’habitude d’y venir deux fois par an, en
général à Pâques et en décembre. Ils y
vivaient dans un faste luxueux. Ils avaient 7 employés à demeure
toute l’année, payés chacun entre 600 000 et un million de pesos par
mois [entre 220 et 380 euros], et lors de leurs séjours, ils
n’hésitaient pas à en recruter d’autres. La villa était somptueusement
décorée de lampes en fer forgé, de statues de monarques européens et de
portraits de dignitaires français et colombiens. L’une des pièces était
exclusivement consacrée à la garde-robe de la princesse et à ses bijoux,
à l’abri dans un coffre-fort. Parties de polo et balades à cheval
rythmaient le quotidien. Des réceptions étaient également souvent
organisées avec plusieurs dizaines d’invités, animées par un groupe de
musiciens locaux ou par des quatuors à cordes venus de Girardot, ainsi
que d’élégants dîners servis dans de la porcelaine française, où l’on
retrouvait autour de la table des notables colombiens, le président [colombien] et
son épouse, des diplomates et des personnalités européennes. L’ancien
président colombien
Andrés Pastrana [1998-2002] et son épouse étaient régulièrement invités
par la princesse. Comme l’a révélé l’hebdomadaire Le Nouvel Observateur,
les enquêteurs français ont désormais dans leur ligne de mire la villa
colombienne, son propriétaire et sa princesse. Ce qu’ils ont découvert
met Thierry Gaubert en sérieuse difficulté et son ex-épouse a donné
des informations savoureuses à la police française. Un achat de trois sous-marins, un mystérieux intermédiaire
franco-libanais, des valises remplies d’euros provenant de commissions
illégales transportées par Gaubert de Suisse en France, une décennie
d’intrigues politiques françaises sordides, un président, une princesse,
une épouse offensée balançant tout à la police, des dizaines de
millions d’euros, un attentat qui coûta la vie à 14 personnes, dont 11 Français à
Karachi, la capitale du Pakistan et une propriété à El Nilo, Colombie,
composent cette sorte de télénovela internationale, dont la “connexion
colombienne” constitue un nouveau rebondissement.